11.03.2020 – Rapport “Maintien de l’ordre : à quel prix ?”
Issu de plus d’un an d’enquête, le rapport examine l’évolution des pratiques de maintien de l’ordre depuis le début des années 2000 et met en avant de nombreux dysfonctionnements. Multiplication des cas de violences illégitimes, restriction des libertés publiques et des droits fondamentaux, rupture du lien de confiance entre les institutions, notamment policière, et les citoyens… L’ACAT interroge : l’ordre doit-il être maintenu à ce prix ?
Les principales demandes de l’ACAT :
- Ne faire intervenir lors d’opérations de maintien de l’ordre que des agents suffisamment formés. La spécificité des unités spécialisées dans le maintien de l’ordre doit être reconnue et leur formation doit être améliorée et actualisée afin de mieux prendre en compte les évolutions des manifestations, et garantir un exercice effectif des libertés.
- Renforcer la formation des agents des forces de l’ordre au maniement des armes, létales ou non.
- Assurer la transparence sur la dangerosité des armes utilisées et leur composition, et publier régulièrement des données concernant l’usage des armes et de la force, le nombre de personnes blessées ou tuées dans le cadre d’intervention des forces de l’ordre, ainsi que les sanctions judiciaires et disciplinaires prononcées.
- Suspendre l’utilisation des grenades de désencerclement et des GM2L dans l’attente d’un examen complet et indépendant de ces armes.
- Interdire l’utilisation des lanceurs de balles de défense (LBD) par les forces de l’ordre.
- Créer un organe indépendant chargé d’enquêter sur des faits commis par des agents de police et de gendarmerie.
[Source : Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture]
RAPPORT “Des policiers au-dessus des lois” – 2009
L’examen des éléments qui lui étaient soumis a conduit Amnesty International à conclure que les agents de la force publique bénéficiaient couramment, en France, d’une impunité de fait.
Dans le rapport, nous avions dégagé plusieurs facteurs qui favorisaient ce climat d’impunité : les lacunes ou les faiblesses de la législation ; l’incapacité ou le manque d’empressement de la police, du ministère public et des tribunaux dès qu’il s’agit de mener des enquêtes exhaustives sur des violations des droits humains impliquant des agents de la force publique et d’en poursuivre les auteurs présumés ; les peines, enfin, sans commune mesure avec la gravité de l’infraction.
Amnesty International admet que la tâche des responsables de l’application des lois en France est difficile et dangereuse, qu’elle les expose souvent à des risques importants et que la majorité de ces agents s’acquittent de leurs fonctions de manière professionnelle, dans le respect de la loi. Il n’en demeure pas moins que des erreurs et fautes sont parfois commises, et qu’il est nécessaire de le reconnaître. En cas d’allégation de violations des droits humains, les autorités doivent ouvrir promptement une enquête exhaustive, indépendante et impartiale. Les mesures disciplinaires qui s’imposent doivent être prises, et les agents de la force publique soupçonnés d’actes tombant sous le coup de la loi doivent comparaître en justice dans le cadre d’un procès équitable. Les autorités doivent veiller à ce que les auteurs d’infractions rendent compte de leurs actes et montrer à la population qu’elles y ont veillé. Autrement, la crédibilité des organes chargés de faire respecter la loi en pâtit, à l’instar des relations de ces organes avec la population. Les violences qui ont éclaté à la suite de décès liés à des opérations policières (par exemple les émeutes qui se sont produites après la mort de deux adolescents poursuivis par des policiers à Clichy-sous-Bois, en novembre 20053) en témoignent très clairement.
Lors de certaines manifestations pacifiques organisées pour demander justice, par exemple celles qui ont suivi la mort d’Abdelhakim Ajimi à Grasse en mai 2008, on a vu se faire jour des mouvements de colère et de défiance moins spectaculaires mais loin d’être négligeables.
Malheureusement, les autorités françaises n’ont appliqué aucune des recommandations essentielles qui visaient à lutter contre les violations des droits humains et le climat d’impunité évoqués dans le rapport publié en 2005 par Amnesty International. Par conséquent, quatre ans plus tard, les problèmes mentionnés en 2005 n’ont toujours pas été réglés. Au fil de ses recherches, Amnesty International a pris connaissance de nouvelles allégations de violations des droits humains commises en France par des agents de la force publique. Les méthodes utilisées pour enquêter sur ces allégations ne sont toujours pas à la hauteur des normes du droit international, et les habitants de la France s’attendent à mieux.
Par ailleurs, Amnesty International constate l’accentuation manifeste d’un phénomène inquiétant : les personnes qui protestent ou tentent d’intervenir lorsqu’elles sont témoins de mauvais traitements infligés par des responsables de l’application des lois sont elles-mêmes accusées d’outrage (insulte envers une personne dépositaire de l’autorité publique) ou de rébellion (résistance avec violence envers un représentant de l’autorité). Dans d’autres cas, des personnes qui se sont plaintes d’avoir subi des mauvais traitements sont accusées de diffamation par les agents concernés. Amnesty International pense que ces pratiques peuvent exercer une dissuasion très forte sur les personnes qui essaient d’obtenir justice après avoir été témoins ou victimes de violations des droits humains ; elles risquent donc d’aggraver encore le climat d’impunité actuel.”
RECOMMANDATIONS 1
créer un organisme indépendant chargé d’enquêter sur les plaintes contre les agents de la force publique. Cet organisme pourrait être une version améliorée de la CNDS, ou prendre la forme d’un service spécial au sein du bureau du défenseur des droits. Quelle que soit la forme adoptée, Amnesty International considère que cet organe doit impérativement, pour fonctionner de manière efficace, respecter les critères énoncés ci-après.
Recommandation 2
Il doit être habilité à enquêter sur toutes les allégations de violations graves des droits humains formulées contre les responsables de l’application des lois, notamment les morts en détention, les homicides (y compris ceux consécutifs à l’usage d’armes à feu), les actes de torture, les actes à caractère racistes et les autres traitements cruels, inhumains ou dégradants.
Recommandation 3
Il doit avoir la capacité de recevoir et d’enregistrer les plaintes déposées directement par toute personne qui le souhaite, d’enquêter sur ces plaintes et de se saisir d’office lorsqu’il l’estime nécessaire, en l’absence de saisine par un tiers.
Recommandation 4
Il doit avoir les pouvoirs, la compétence et les moyens nécessaires pour enquêter sur toutes les allégations de violations des droits humains commises par des responsables de l’application des lois, notamment :
- le pouvoir et les moyens d’examiner immédiatement les lieux où les faits se sont déroulés ;
- le pouvoir de convoquer des témoins et d’ordonner la communication de documents et de tout élément de preuve, sans que l’exercice de ce pouvoir ne donne jamais lieu à une procédure pénale pour « dénonciation calomnieuse » ou « préjudice moral » ;
- le pouvoir de suivre les enquêtes menées par la police dans toute affaire pénale soumise au parquet par l’organe indépendant ;
- le pouvoir de superviser ou de diriger, lorsque nécessaire, les enquêtes de l’IGPN, de l’IGS et de l’Inspection de la Gendarmerie nationale (IGN), et de se substituer à ces organes dans leurs fonctions d’enquête dans les affaires de violations graves des droits humains.
Recommandation 5
Il doit disposer du personnel et de la direction appropriés, à savoir des professionnels dont la compétence, l’impartialité, l’expertise, l’indépendance et la probité sont reconnues et qui n’appartiennent ni aux organes chargés de l’application des lois ni au ministère public. L’organe d’enquête indépendant doit avoir à sa disposition un corps d’enquêteurs indépendants et spécialisés, chargés de mener les investigations sur les plaintes reçues.
Recommandation 6
Il doit pouvoir saisir directement le parquet lorsqu’il l’estime nécessaire, et pouvoir faire appel devant la justice de toute décision du ministère public ou du magistrat instructeur, y compris des décisions de classement sans suite ou de non-lieu, et des décisions concernant les peines.
Recommandation 8
Il doit pouvoir ordonner l’ouverture d’une procédure disciplinaire et exiger de l’organe disciplinaire qu’il lui rende compte de cette procédure.
Recommandation 9
Il doit pouvoir ordonner, de manière contraignante, que des excuses soient présentées ou des critiques formulées, et pouvoir recommander le versement d’une indemnisation appropriée aux victimes.
Recommandation 10
Il doit faire l’objet d’une large information au sein de la population, notamment dans les locaux des postes de police.
Amnesty International invite le ministère de l’Intérieur à veiller aux points suivants.
- Il ne devrait pas faire de déclarations publiques exprimant son opinion sur la véracité des allégations formulées par un plaignant contre un agent de la force publique tant que l’instruction ou toute autre procédure judiciaire ou disciplinaire est en cours, afin d’éviter de donner une impression de partialité.
- Il devrait recueillir et publier des statistiques régulières, uniformisées et exhaustives sur les plaintes pour fautes déposées contre des agents de la force publique, notamment sur les plaintes pour mauvais traitements. Ces statistiques devraient inclure : des informations sur le nombre de plaintes pour mauvais traitements et sur les mesures prises en réponse à chaque plainte, les conclusions des éventuelles enquêtes pénales et disciplinaires, des chiffres sur les allégations de violences racistes, et des données statistiques sur la nationalité et l’origine ethnique des plaignants.
- Il devrait interdire l’utilisation de méthodes de contrainte dangereuses, ainsi qu’élaborer et appliquer, dans les formations initiales et continues, les protocoles et lignes de conduite sur le recours approprié à la force et aux méthodes de contrainte pleinement conformes aux normes internationales relatives aux droits humains, notamment la Convention européenne des droits de l’homme, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, la Convention des Nations unies contre la torture, le Code de conduite pour les responsables de l’application des lois, et les Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois.
- Il devrait autoriser et assurer la publication dans leur intégralité des rapports annuels des services internes d’inspection des organes chargés de l’application des lois (IGS, IGPN et IGN). Ces rapports doivent être facilement accessibles au grand public, par exemple sur le site Internet du ministère de l’Intérieur.
Amnesty International invite le parquet et les juges d’instruction à adopter les pratiques suivantes
- Ils devraient mener dans les plus brefs délais des enquêtes exhaustives et impartiales chaque fois qu’il existe des motifs raisonnables de croire que des agents de la force publique ont pu commettre des violations des droits humains.
- Ils devraient veiller à ce que, lorsque des plaintes sont déposées simultanément par une personne accusant des agents de la force publique de violations des droits humains et par ces mêmes agents pour outrage ou rébellion, aucune des deux plaintes ne soit utilisée pour discréditer l’autre. Les plaignants doivent être protégés de toute forme d’intimidation ou de représailles.
- Ils ne devraient pas faire de déclarations publiques exprimant leur opinion sur la véracité des allégations formulées par un plaignant contre un agent de la force publique tant que l’instruction ou toute autre procédure judiciaire ou disciplinaire est en cours, afin d’éviter de donner une impression de partialité.
- Ils devraient veiller à ce que les dispositions sur le caractère aggravant des motivations racistes soient correctement appliquées, le cas échéant.
Amnesty International invite les organes chargés de l’application des lois à :
- Veiller à ce que les informations sur les procédures d’enquête internes, notamment sur la manière de déposer une plainte pour faute policière, soient facilement accessibles au grand public (par exemple dans les commissariats, les mairies et sur Internet) ;
- Développer la formation et la sensibilisation des agents de la force publique aux relations interculturelles ;
- Veiller à ce que des mesures disciplinaires appropriées soient prises contre les agents de la force publique qui procèdent à des arrestations injustifiées, à titre de représailles, ou qui portent de fausses accusations contre des personnes ayant porté plainte pour faute.
[Source : Amnesty International]
[Archive : 2009_Amnesty.International_France.Des.Policiers.Au-dessus.Des.Lois.pdf]
20.02.2019 – Rapport n° 345 de Mme Jacqueline EUSTACHE-BRINIO, au nom de la commission des lois visant à interdire l’usage des lanceurs de balles de défense dans le cadre du maintien de l’ordre et à engager une réflexion sur les stratégies de désescalade et les alternatives pacifiques possibles à l’emploi de la force publique dans ce cadre
Proposition de loi visant à interdire l’usage des lanceurs de balles de défense dans le cadre du maintien de l’ordre et à engager une réflexion sur les stratégies de désescalade et les alternatives pacifiques possibles à l’emploi de la force publique dans ce cadre.
- LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
- INTRODUCTION
- I. LES LANCEURS DE BALLES DE DÉFENSE : UNE ARME DE FORCE INTERMÉDIAIRE À L’USAGE ÉTROITEMENT CIRCONSCRIT
- A. UN ENCADREMENT STRICT DE L’USAGE DE LA FORCE LÉGITIME DANS LES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE L’ORDRE
- B. LES LANCEURS DE BALLES DE DÉFENSE : UN EMPLOI LIMITÉ À DES FINALITÉS DÉFENSIVES
- C. UNE PROGRESSION RÉCENTE ET CONJONCTURELLE DE L’USAGE DES LANCEURS DES BALLES DE DÉFENSE DANS LES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE L’ORDRE
- II. LA PROPOSITION DE LOI : INTERDIRE L’USAGE DES LANCEURS DE BALLES DE DÉFENSE ET INCITER À LA MISE EN oeUVRE D’ALTERNATIVES PACIFIQUES À L’EMPLOI DE LA FORCE DANS LE CADRE DES OPÉRATIONS DE MAINTIEN DE L’ORDRE
- III. LA POSITION DE LA COMMISSION : REJETER DES DISPOSITIONS DE NATURE À FRAGILISER L’ACTION DES FORCES DE L’ORDRE
- I. LES LANCEURS DE BALLES DE DÉFENSE : UNE ARME DE FORCE INTERMÉDIAIRE À L’USAGE ÉTROITEMENT CIRCONSCRIT
- EXAMEN EN COMMISSION
- LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
[Sources : Assemblée nationale, Sénat
Rapport « Contrôle, surveillance, punition » sur la répression post-mMobilisation « mégabassines » de juillet 2024
Charges brutales, grenades lancées en zones habitées, nasse illégale sous 30°C, incendies dus à des tirs de lacrymogènes, violences sur des journalistes … Du 16 au 21 juillet 2024, la mobilisation pour la défense de l’eau organisée à l’appel des collectifs Bassine non-merci et les Soulèvement de la Terre, a été le théâtre d’un dispositif sécuritaire d’une ampleur exceptionnelle. Dix Observatoires des libertés publiques et des pratiques policières venus de toute la France étaient présents pour observer et documenter le dispositif de maintien de l’ordre mis en place. Un an et demi après la parution du rapport Sainte-Soline, qui a permis de rétablir la vérité sur la violence de la répression, l’interobservatoire publie ce mardi 24 juin 2025 son rapport sur la mobilisation « mégabassines » de juillet 2024. Dans ce dernier, les Observatoires dressent deux constats alarmants.
- Un usage illégal et punitif de la force, considérée non pas comme une réponse de dernier recours mais comme une stratégie première du maintien de l’ordre. Ces usages abusifs de la force, en contradiction flagrante avec les exigences du droit ou une quelconque stratégie de désescalade, ont entraîné une mise en danger collective – manifestants comme riverains.
- Une criminalisation des militantes et militants environnementaux. Un récit sécuritaire, reposant sur une rhétorique de menace et de violence a été déployé en amont et pendant la manifestation jusqu’aux plus hautes sphères du gouvernement. Largement relayé dans les médias, il s’est appuyé sur des faits approximatifs voire mensongers, contribuant à justifier la répression.
Les faits observés lors de cette semaine de mobilisation s’inscrivent dans une continuité désormais bien identifiée par les observatoires : qu’il s’agisse de Sainte-Soline, de la lutte contre l’A69 ou des mobilisations pour l’eau en 2024, un même schéma se répète. Ce qui est à l’œuvre n’est pas une succession de dérapages isolés, mais une doctrine de maintien de l’ordre fondée sur la surveillance, le contrôle et la punition des mobilisations environnementales.
Après un an de travail, les dix Observatoires publient un rapport essentiel pour le débat démocratique sur le maintien de l’ordre en France.
[Source : Ligue des droits humains]
[Archive : 2025.06.24_LDH_Rapport.Megabassines.2024.pdf]
11.02.2021 – Avis sur les rapports entre police et population : Rétablir la confiance entre la police et la population
Recommandation n° 1 :
Réorienter les politiques publiques de sécurité, en remettant en cause l’évaluation chiffrée de la performance policière et en redéfinissant les missions attribuées par les acteurs politiques à la police, dès lors qu’elles influencent dans une grande mesure le répertoire d’actions mobilisé sur le terrain et, de ce fait, les relations entretenues avec la population.
Recommandation n° 2 :
Réécrire l’article du code de déontologie de la police et de la gendarmerie relatif au cadre général de leur action, en accordant une place privilégiée à la « protection des personnes et des biens » et en rappelant que la police a pour raison d’être la garantie des libertés et des droits fondamentaux.
Recommandation n° 3 :
Rétablir une authentique police de proximité, adossée à une doctrine d’intervention fondée sur la construction d’une relation privilégiée avec la population, se substituant à la réponse uniquement réactive et punitive trop souvent constatée à l’heure actuelle face aux incivilités.
Recommandation n° 4 :
Évaluer régulièrement la qualité de la relation entre population et habitants, au sein des commissariats de police et des brigades de gendarmerie, à partir d’indicateurs précis et participatifs évaluant la satisfaction des usagers, qui doivent être tout autant pris en compte en termes de carrière, d’avancement et d’évaluation de l’activité policière que les indicateurs traditionnels (taux d’élucidation d’affaires, taux de présence policière sur la voie publique, etc.) ; les rendre pleinement accessibles à toutes les personnes en situation de handicap, ainsi que les démarches dématérialisées ; veiller à une répartition égale sur tout le territoire des commissariats et gendarmeries, en mettant en place, au besoin, des permanences régulières en mairie quand les locaux sont trop éloignés.
Recommandation n° 5 :
Étendre le dispositif d’officier de liaison LGBT de la préfecture de police de Paris à d’autres agglomérations et aux victimes de handiphobie, de racisme ou de xénophobie.
Recommandation n° 6 :
Sur les contrôles d’identité :
- Remettre aux personnes contrôlées un récépissé papier nominatif, précisant l’heure, le lieu et les motifs du contrôle. Afin d’éviter la constitution d’un fichier nominatif, le carnet à souche du policier ou gendarme devra reproduire toutes les indications du récépissé, sauf l’identité de la personne contrôlée ;
- Mettre en place un dispositif de suivi des contrôles, pour permettre aux hiérarchies de prendre connaissance des conditions de leur mise en œuvre (quels agents ? pour quels motifs ?) ;
- Engager une réflexion de fond sur l’encadrement légal et la pratique des contrôles d’identité afin de lutter contre leur banalisation, notamment en précisant les motifs légaux pouvant justifier un contrôle.
Recommandation n° 7 :
Engager une réflexion sur le pouvoir de verbalisation exercé par les policiers et les gendarmes dans certains quartiers et à l’égard de certaines catégories de personnes.
Recommandation n° 8 :
Pour les modalités du maintien de l’ordre en manifestation :
- Privilégier les stratégies de désescalade dans l’encadrement des manifestations ;
- Instaurer un dialogue effectif entre forces de l’ordre et manifestants ;
- Le cas échéant, s’assurer de l’intelligibilité des sommations ;
- Mobiliser exclusivement des unités spécialisées dans le maintien de l’ordre ;
- Interdire certaines pratiques, telles que les nasses, les « contrôles délocalisés », et harmoniser les techniques d’intervention entre police et gendarmerie en favorisant les moins « vulnérantes » ;
- Cesser les « gardes à vue préventives » en amont des manifestations.
Recommandation n° 9 :
Inclure dans la formation initiale des personnels de police et de gendarmerie des enseignements axés sur la pratique :
- de sciences humaines et sociales afin d’encourager une réflexion des policiers sur la nature de leurs missions ;
- en communication (respect de l’autre, techniques de médiation, de gestion des tensions, de gestion du stress d’autrui…) ;
- sur le fonctionnement de la justice (alternatives à la détention, principes d’application et de personnalisation des peines dans un objectif de réinsertion et de prévention de la récidive) ;
- d’éthique, qui favoriserait un retour critique des agents sur leur pratique.
Recommandation n° 10 :
Prévoir dans la formation initiale un tronc commun aux trois corps de police.
Recommandation n° 11 :
Développer et garantir la formation continue des personnels de police et de gendarmerie, tant pour maintenir leur aptitude à l’utilisation des armes et des gestes techniques que pour les sensibiliser aux difficultés éprouvées par les victimes et certaines catégories de la population dans leurs rapports avec la police.
Recommandation n° 12 :
Renforcer l’encadrement des jeunes recrues affectées dans des quartiers sensibles.
Recommandation n° 13 :
Développer des moyens de fidéliser les personnels de police expérimentés en Île-de-France, notamment pour compenser le surcoût de la vie.
Recommandation n° 14 :
Mettre en place une plateforme unique de signalements des manquements à la déontologie, commune au DDD, à l’IGPN et l’IGGN ; Informer les victimes ou témoins des suites de leur signalement et de l’état d’avancement de la procédure.
Recommandation n° 15 :
Accorder au DDD une compétence privilégiée pour donner suite aux signalements des victimes ou témoins d’atteinte aux personnes – sans préjudice du droit des inspections de s’en saisir parallèlement si elles l’estiment opportun.
Recommandation n° 16 :
Renforcer les échanges entre le DDD et les services d’inspection de la police et de la gendarmerie, notamment à travers des rencontres régulières, des détachements de personnels, ou des initiatives communes.
Recommandation n° 17 :
Accorder au DDD le pouvoir d’enjoindre à l’autorité compétente d’engager des poursuites disciplinaires ; Soumettre cette autorité à l’obligation de motiver de manière circonstanciée, au terme de la procédure, les refus de prononcer une sanction disciplinaire, le cas échéant contre l’avis du conseil de discipline.
Pour les enquêtes judiciaires relatives à des policiers ou des gendarmes, créer un corps d’inspection ad hoc, composé d’officiers de police judiciaire spécialement dédiés à ces enquêtes, dotés d’un statut particulier, ne relevant pas du ministère de l’Intérieur mais du ministère de la Justice ; À défaut d’un tel service d’enquête, a minima renforcer les garanties d’indépendance et d’impartialité de l’IGPN et de l’IGGN :
- substituer au contrôle des directions générales de la police et de la gendarmerie un rattachement des services d’inspection directement au ministre de l’Intérieur;
- créer un organe collégial ouvert à des personnalités extérieures (notamment des magistrats, des avocats, et des représentants de la société civile), chargé de la supervision des enquêtes, et compétent pour décider des suites à donner aux enquêtes judiciaires (et administratives).
Recommandation n° 19 :
Accorder le statut de lanceur d’alerte aux policiers et aux gendarmes qui témoignent de dysfonctionnements graves, sans les soumettre à l’exigence de transmettre préalablement le signalement à leur hiérarchie.
Recommandation n° 20 :
Tant pour les enquêtes administratives et les sanctions disciplinaires que pour les enquêtes judiciaires et les décisions de justice, prévoir plus de transparence à tous les niveaux de la chaîne (inspections, DDD, ministre, justice), avec des indicateurs harmonisés permettant de suivre statistiquement et individuellement le traitement et l’issue administrative et/ou judiciaire des signalements, à partir d’une publication au moins annuelle dans le respect de l’anonymat des agents.
Recommandation n° 21 :
Revoir les modalités d’affichage du RIO afin de le rendre parfaitement visible des citoyens.
Recommandation n° 22 :
Équiper les agents de police et de gendarmerie de caméras-piétons fonctionnelles et prévoir un enregistrement systématique des interventions.
Recommandation n° 23 :
Garantir la liberté d’informer à l’égard des interventions des forces de l’ordre, en rappelant notamment à ces derniers qu’ils ne peuvent s’opposer à l’enregistrement de leur image lorsqu’ils effectuent une mission.
[Source : CNCDH]
09.07.2020 – Décision-cadre Maintien de l’ordre
Le Défenseur des droits, d’une part, renouvelle les alertes et les recommandations déjà formulées dans son rapport « Le maintien de l’ordre au regard des règles de déontologie » remis au Président de l’Assemblée nationale en janvier 2018, et en particulier :
- interdiction du LBD au cours des opérations de maintien de l’ordre
- fin de la pratique de l’encagement
- difficultés posées par l’excessive judiciarisation des manifestations et par le recours d’unités non dédiées au maintien de l’ordre.
Le Défenseur des droits formule, d’autre part, de nouvelles recommandations qui font suite aux 198 saisines relatives au maintien de l’ordre reçues depuis 18 mois à la suite du mouvement des Gilets jaunes, et aux échanges avec ses homologues européens dans le cadre du réseau IPCAN et notamment le séminaire « Relations police – population : enjeux et pratiques », conduit les 17 et 18 octobre 2019 en collaboration avec l’Agence des droits fondamentaux de l’Union européenne. Le Défenseur des droits :
- alerte sur les conséquences des interpellations préventives de personnes aux abords des manifestations, au motif qu’elles sont trouvées porteuses de masques de protection, de lunettes de piscine ou de gilets jaunes. Cette pratique relativement récente induit un risque de recourir à des mesures privatives de liberté de manière disproportionnée et de favoriser les tensions
- recommande que le cadre juridique du recours à la confiscations d’objets à l’occasion des opérations de maintien de l’ordre soit clarifié en distinguant les mesures prises à des fins judiciaires de celles prises à des fins administratives. En l’absence de cadre légal, de modalités de confiscation, de stockage ou de restitution, ces mesures portent atteinte au droit de propriété.
- rappelle que la liberté de la presse est l’un des principes fondamentaux des systèmes démocratiques et qu’il repose sur la liberté d’opinion et la liberté d’expression. Il recommande qu’une vigilance particulière puisse être accordée aux journalistes afin qu’ils puissent exercer leur profession en toute sécurité lors des opérations de maintien de l’ordre. Le Défenseur des droits recommande que la même vigilance soit accordée aux observateurs identifiables issus de la société civile.
- constate des difficultés faisant obstacle au contrôle de l’action des forces de l’ordre. Certaines de ses enquêtes ne peuvent aboutir faute de pouvoir identifier les agents notamment lorsqu’ils sont porteurs de casque ou encore par la manque de fiabilité dans la mise en œuvre de la traçabilité des usages d’armes. Le Défenseur des droits rappelle que le contrôle effectif des agents des forces de l’ordre doit permettre de répondre aux critiques exprimées par les citoyens à l’égard des forces de l’ordre et recommande ainsi que soient prises des mesures permettant l’identification des agents des forces de l’ordre.
Il rappelle que le travail des policiers et gendarmes est rendu possible par la confiance qu’ils inspirent. La mission de contrôle de la déontologie du Défenseur des droits est fondée sur cette idée et vise notamment à renforcer cette confiance par des enquêtes effectives, indépendantes et dont les résultats sont rendus publics.
[Source : Défenseur des droits]
12.2017 – “Le maintien de l’ordre au regard des règles de déontologie”
Rapport du Défenseur des droits saisi en vue de réaliser une étude sur « les conséquences de la doctrine et de la pratique du maintien de l’ordre en France par les forces de l’ordre au regard des règles de déontologie qui s’imposent à elles » comportant, en outre, des éléments comparatifs sur l’organisation de l’ordre public à l’étranger.
[Source : Défenseur des droits]
12.11.2020 – Rapport du Haut-Commissariat à Macron sur la proposition de loi Sécurité globale
“Nous craignons que l’adoption et l’application de cette proposition de loi puissent entraîner des atteintes importantes aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales, notamment le droit à la vie privée, le droit à la liberté d’expression et d’opinion, et le droit à la liberté d’association et de réunion pacifique, tels qu’établis dans la Déclaration universelle des droits de l’homme (respectivement aux articles 12, 19 et 20), le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (le « PIDCP ») (respectivement aux articles 17, 19 et 21) et la Convention européenne des droits de l’homme (respectivement aux articles 8, 10 et 11).” […]
“Comme il est de notre responsabilité, en vertu des mandats qui nous ont été confiés par le Conseil des droits de l’homme, de solliciter votre coopération pour tirer au clair les cas qui ont été portés à notre attention, nous serions reconnaissants au Gouvernement de votre Excellence de ses observations sur les points suivants:
- Veuillez nous fournir toute information ou tout commentaire
complémentaire en relation avec les allégations susmentionnées. - Veuillez préciser dans quelle mesure le public, en particulier les acteurs concernés de la société civile, des organisations non gouvernementales et des autres parties prenantes intéressées sont habilitées et invitées à partager leurs vues et observations sur la présente proposition de loi et à participer en général au processus d’élaboration des lois.
- Veuillez fournir des informations relatives à la définition et les suppléments de précision de la terminologie utilisée dans cette proposition de loi au vu des remarques développées dans cette lettre, ceci, en vue de garantir une protection efficace des droits qui pourraient être impactés par cette loi.
- Veuillez fournir des informations sur les mesures prises pour s’assurer que les dispositions ne portent pas atteinte aux droit à la vie privée, à la liberté de réunion pacifique, la liberté d’expression et la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations.”
[Source : Ligue des droits de l’Homme]
17.12.2020 – CONTRÔLER, RÉPRIMER, INTIMIDER. Nasses et autres dispositifs d’encerclement policier lors des manifestations parisiennes, printemps 2019 – automne 2020
Les observations réalisées mettent en évidence le caractère récurrent d’un style de dispositifs de maintien de l’ordre, désormais bien connu des habitué.es des manifestations : les dispositifs d’encerclement.
Il s’agit de contrôler les manifestant.es au sein d’un espace, dont les contours sont dessinés par des lignes de policiers ou gendarmes. Toute entrée ou sortie du dispositif est alors soumise au laisser-passer des agent.es. Parmi ces dispositifs d’encerclement, la nasse apparaît comme le paroxysme de ce style de maintien de l’ordre, puisque les lignes d’agent.es forment alors des frontières étanches, clôturant un espace dont il est impossible de s’extraire.
Partie I – Typologie des dispositifs observés en manifestation
- Les nasses
- Autres dispositifs d’encerclement policier
- Dispositifs mobiles
- Encerclement mobile ouvert
- Encerclement mobile contraignant
- Dispositifs statiques
- La sortie sous condition
- L’itinéraire d’évacuation
- Dispositifs mobiles
- Premières conclusions à partir de ces observations & Annexes
Partie II – La dimension politique des dispositifs d’encerclement : la manifestation de rue st-elle encore possible lorsque la police encercle le cortège ?
- Qu’est-ce qu’une manifestation de rue ?
- L’encerclement, un style de maintien de l’ordre neutralisant la manifestation de rue
- Les inversions du rapport de force
- Une pratique d’assujettissement des manifestant.e.s
- L’inversion de la démonstration de force
- L’invisibilisation des revendications
- Les inversions du rapport de force
Partie III – La nasse, une pratique attentatoire aux libertés publiques
- L’atteinte au droit de circuler librement
- La liberté d’aller et de venir selon le Conseil constitutionnel
- L’article 2 du protocole additionnel n°4 à la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales
- Des privations de liberté arbitraire
- L’atteinte au droit de manifester et à la liberté d’expression
- Sur l’article 11 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales
- Sur l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales
- L’atteinte à la dignité et à la sécurité des personnes
- Atteintes physiques
- Atteintes psychologiques
- Atteintes physiques et psychologiques renforcées par l’utilisation d’armes
- Atteintes physiques et psychologiques renforcées par la présence de personnes vulnérables
- Exemple d’autres États parties à la Convention européenne des droits de l’Homme
- Enquêtes et suites judiciaires
- Les voies de droit envisageables
- Saisine du Défenseur des droits
- Dépôt de plainte en raison d’une privation arbitraire de liberté
- Requête indemnitaire devant le tribunal administratif
[Source : Observatoire parisien des libertés publiques]
11. 2018 – “Les policiers et gendarmes décédés et blessés en 2018″
En 2018, 25 policiers et gendarmes ont été tués durant l’exercice de leurs fonctions (contre 15 décès en 2017). Parmi eux, 11 étaient fonctionnaires de police. Quatre sont décédés en mission lors d’opérations de police et 7 sont morts en service, c’est-à-dire durant les heures de travail en dehors des missions opérationnelles. La gendarmerie compte 14 militaires décédés, dont 9 en mission.
Par ailleurs, 20 306 policiers et gendarmes ont déclaré avoir été blessés ou s’être blessés dans le cadre de leurs activités, que ce soit en mission de police ou durant les heures de service. Un peu plus de la moitié a été blessée en mission (53 %), soit 10 790 agents actifs (6 002 policiers et 4 788 gendarmes). Ce nombre est en hausse de 15 % comparé à l’année 2017. Par ailleurs, 9 516 policiers et gendarmes ont déclaré avoir été blessés ou s’être blessés en service en 2018 (respectivement 6 851 et 2 665), contre 8 930 en 2017.
[Source : ONDRP, La Note No 39]
Revue z #8, été 2014 – Vénissieux
Percer le mur de la hoggra
- Reportage-analyse / Ceci n’est pas une bavure
Sur les crimes policiers et les luttes contre le permis de tuer - Chronologie / Personnes tuées par la police française
- Entretien / « Bizarrement, en prison, ils se suicident tous… »
Rencontre avec le Comité justice et vérité pour Sofiane Mostefaoui - Outil / La caisse de solidarité
- Action / Se défendre de la police
[Télécharger la brochure]
16.09.2020 – Schéma national du maintien de l’ordre 2020
Le ministère de l’Intérieur a publié, jeudi 17 septembre, le nouveau « schéma national du maintien de l’ordre ». L’ACAT, qui mène depuis six ans un important travail de documentation concernant l’usage de la force par la police et la gendarmerie, a passé en revue le texte. L’ONG dénonce une absence de réelle remise en cause de la pratique qui a prévalu ces dernières années – en dépit de la gravité et la répétition des incidents impliquant les forces de l’ordre – et consacrant une restriction importante du droit de manifester.