Le 22 septembre au petit matin, Juanro Rasuli et sept autres exilés iraniens transportent un canot sur la plage près de Dunkerque, qui devait conduire une quarantaine de personnes au Royaume-Uni. S’en suit une altercation avec les forces de l’ordre présentes dans un véhicule.
Un témoin raconte au Daily Mail :
« Nous étions 8 autour du bateau. On se préparait à embarquer 40 personnes pour l’Angleterre. Trois ou quatre policiers sont arrivés dans un véhicule. Quand la police nous a vu, ils ont dit « Stop », et on s’est arrêtés. Mais ils ont tiré quand même, alors on s’est enfuis. L’un deux a tiré sur Juanro à bout portant. Je ne me rappelle pas combien de fois il a tiré de LBD.«
Bilan : deux blessés conduits à l’hôpital : Juanro a la jambe fracturée; un autre homme, la main cassée, suit un traitement médical en ambulatoire.
Suite aux sollicitations de l’antenne régionale de France3 dans les Hauts-de-France, la préfecture a indiqué que « lors de cette opération, un équipage des forces de l’ordre a été pris à partie de manière agressive par des migrants. Les policiers ont fait un usage proportionné de la force, avec les moyens dont ils disposaient, intégrant l’usage de flashball. A ce stade, aucun élément ne permet d’établir un lien entre l’action de la police et les blessures constatées« .
D’après France3, « C’est la toute première fois que des balles en caoutchouc sont utilisées contre des exilés à la frontière franco-britannique« . « Et il ne faudrait pas que cela se répète, le LBD, c’est une arme létale« , soutient un militant de l’Auberge des Migrants à InfoMigrants. D’après lui, « la police a pour ordre de ne surtout pas laisser partir les gens sur les bateaux. Alors ils tentent de les arrêter par tous les moyens, avant la mise à l’eau. Parfois, il lacère les canots pneumatiques« .
L’utilisation du LBD, ou lanceur de balles de défense n’est possible qu’après délivrance d’une habilitation spécifique, obtenue après une formation organisée par le ministère de l’Intérieur. En effet, ces balles en caoutchouc renfermant un noyau métallique sont dangereuses. « En janvier 2021, la commission d’enquête de l’Assemblée Nationale avait publié un rapport qui recommandait d’interdire le lanceur de balles de défense en manifestation, reconnaissant notamment la capacité de l’arme à occasionner des blessures graves, et notamment des fractures« , explique France3 Hauts-de-France.
Dans le Nord et le Pas-de-Calais, son utilisation n’étonne guère l’Auberge des Migrants, tant les forces présentes sur le territoire sont, habituellement, lourdement armées. « Lors des distributions de soupe aux exilés, les policiers portent des fusils-mitraillettes. Officiellement, pour le plan Vigipirate« , affirme-t-il, sceptique. « Mais ici, les violences policières sont quotidiennes. Quand il s’agit de réprimer les migrants, la créativité des policiers est sans faille. Aujourd’hui, en voiture, j’ai vu un camion de CRS passer à côté de deux personnes à pied, vraisemblablement des demandeurs d’asile. Ils ont été pulvérisés de gaz lacrymogène« .
Une enquête de la police nationale française est en cours sur le premier cas connu de recours aux armes à feu pour stopper la mise à l’eau d’un bateau de migrants.